Top 10 : 2017 au grand écran
Certains l’ont peut-être jugée décevante; pour moi, l’année cinéma fut de fort belle tenue. Pigeant parmi tous les films qui ont pris l’affiche à Montréal au courant de 2017, j’ai eu un plaisir fou à mettre sur pied ce top 10 avec des valeurs sûres, des surprises, des coups de cœur, des larmes, de l’angoisse et des rires, le tout venu du monde entier. Tous en piste!
10. Paterson



Le réalisateur-rockstar et l’homme à la chevelure d’argent qui ne vieillit jamais est de retour pour nous parler de poésie. De poésie, et d’élan créateur aussi modeste que grandiose dans un contexte de quotidienneté absolue. Quelle audace! Jarmusch, c’est également un rythme reconnaissable entre tous, tout un art de la déambulation, des acteurs au diapason et la plus belle finale de l’année.
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9. Jeune Femme



Parvenu jusqu’à nous accompagné d’une critique française très favorable, ce premier film suspendu entre les ruptures de ton n’en fut pas moins une vraie belle surprise. Ce portrait de femme en crise est d’une complexité remarquable et capte à point le zeitgeist. Essayez un peu de résister au charme étrange et pénétrant de la tornade rousse Laeticia Dosch, une révélation de l’ordre du coup de foudre !
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8. I Am Not Your Negro / Get Out



Trichons un peu pour inclure ce diptyque, qui n’en est pas un évidemment, mais qui fait totalement sens. Voici deux films qui appuient là où ça fait mal et permettent de prendre le pouls des tensions raciales inhérentes à l’histoire de l’Amérique. Passionnant travail sur les archives du passé, le Raoul Peck nous parle surtout du présent. Quant au film-cendrillon de Jordan Peele, il demeure malgré ses maladresses l’une des propositions narratives les plus surprenantes de l’année.
7. La Tortue Rouge



Ce film d’animation sans paroles permet la rencontre entre la naïveté animiste des studios Ghibli et le savoir-faire d’un vétéran néerlandais. Un récit de sauvetage, de solitude et d’amour d’une délicatesse infinie. Voici des torrents d’émotions pures (et de larmes aussi !).
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6. Poésie sans fin



Jodorowsky est un philosophe, un résistant, et un punk de la plus belle espèce. Celui que je proclame « le plus jeune des réalisateurs de 88 ans » nous fait cadeau du deuxième volet de son autobiographie filmée, et raconte comment la muse et la vocation vinrent au poète. Ce film magique est rempli de trouvailles visuelles, il aère l’esprit et donne le goût du bonheur. Sa liberté est essentielle.
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5. The Florida Project



Pour ce nouveau film acclamé, Sean Baker délaisse la nervosité de son iPhone pour offrir de magnifiques cadrages faisant « honneur » aux monstruosités kitsch des abords de Disneyland. À l’ombre des châteaux en stuc vit toute une faune de laissés-pour-compte, menée par des enfants à la langue bien pendue et aux émotions débordantes. C’est une Amérique que l’on ne voit jamais qui explose dans cette œuvre à la fois euphorisante et déchirante.
4. 120 battements par minute



Coup de cœur pour ce film qui broie le corps et l’esprit en nous transmettant l’expérience de ceux qui ont vécu l’hécatombe des premières années SIDA. Robin Campillo évite (presque) tout didactisme et offre un écrin de choix à de jeunes comédiens exceptionnels, qui méritent tous d’être cités comme il se doit : Nahuel Pérez Biscayart, Arnaud Valois et Antoine Reinartz. Préparez vos mouchoirs.
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3. Baccalauréat



Cette année marqua mes retrouvailles avec le chef de file de ce « nouveau cinéma roumain » qui enchanta les années 2000. Le dernier long-métrage de Mungiu est une merveille de mécanique scénaristique. Un père courage s’y retrouve englué dans le cauchemar bureaucratique d’un pays rongé par la corruption ordinaire. Le réalisateur n’épargne pas sa mère patrie, mais si sa mise en scène est toujours aussi acérée, son regard développe une toute nouvelle humanité.
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2. Ceux qui font les révolutions à moitié n’ont fait que se creuser un tombeau



Prolifique, Simon Lavoie a terminé l’année avec le très beau La Petite fille qui aimait trop les allumettes. Mais il l’avait aussi très bien commencée en compagnie de Mathieu Denis avec ce film-fleuve, odyssée de près de trois heures et brûlot sur l’engagement politique. Une œuvre imaginée dans les lendemains désenchantés du printemps érable qui a (forcément) fait polémique, mais dont il faut surtout retenir l’ambition folle et la volonté d’« œuvre d’art totale » proprement stupéfiante.
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1. Toni Erdmann



On se souviendra longtemps de l’année où une comédie allemande de quasi trois heures a conquis le monde… Impossible de passer outre ce film-phénomène au ton si singulier, qui ne ressemble à rien et qui, par conséquent, est totalement inoubliable. De l’Europe moderne à l’amour filial, Toni Erdmann brasse des thèmes riches et variés, entre l’intime et le collectif, qui sonnent tous tellement juste dans le monde aujourd’hui. Maren Ade est aussi la pointe de l’iceberg d’un nouveau cinéma allemand au féminin, au regard d’une finesse remarquable (voir Western de Valeska Grisebach). Et puis, impossible d’oublier les fausses dents de Winfried, les Kukeri bulgares et la Naked Party.
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