Comment j’ai déclenché
la Seconde Guerre mondiale :
la guerre en riant
Comment j’ai déclenché la Seconde Guerre mondiale
de Tadeusz Chmielewski



Inaugurons aujourd’hui une nouvelle rubrique au sein de Kino Pravda ! Dans la section Ciné-club, je parlerai ponctuellement de films vus çà et là, découvertes plus ou moins anciennes. L’accent sera mis sur des films peu connus, non seulement du grand public, mais de l’histoire du cinéma en général. Certaines de ces chroniques pourront parfois être en lien avec l’actualité, ou pas du tout — c’est d’ailleurs le cas de celle qui suivra. Avec la quantité de nouveautés et de films vus en festivals, je n’ai pas assez de temps à mon goût pour explorer l’infini catalogue de ces classiques ou de curiosités qui me sont encore inconnues. Mais parfois je prends une pause (ou une soirée de liberté) que je consacre à regarder un film comme ça, pour le plaisir, « pour rien » bref. Et parfois, cela entraîne de fabuleuses surprises. Donc acte cette semaine.
Je l’ai déjà dit et je le répète, je suis une fan absolue de cinéma polonais. J’ai d’ailleurs dédié ma maîtrise en études cinématographiques au dyptique d’Andrzej Wajda, L’Homme de marbre/L’Homme de fer. Tous les cinéastes polonais m’enchantent, des grands maîtres des années 70 (Krzysztof Kieślowski, Krzysztof Zanussi, Jerzy Skolimowski, Andrzej Zulawski, et des tas d’autres) aux débutants plus que prometteurs (quelle claque que fut The Last Family de Jan P. Matuszyński au dernier Festival du Nouveau Cinéma !). Par contre, je ne connaissais absolument rien de Tadeusz Chmielewski, décédé tout récemment en décembre dernier, juste un peu après Wajda. La première fois que j’ai entendu parler de son classique Comment j’ai déclenché la seconde Guerre mondiale (Jak rozpętałem drugą wojnę światową), c’était dans un article sur l’extrême difficulté de prononciation de la langue polonaise. En guise d’illustration comique, l’article nous proposait l’extrait suivant :
J’étais déjà conquise. Restait à mettre la main sur ce film de 1970 en trois parties, destiné au départ pour la télévision d’État. Ce fut le coup de foudre ! Comment j’ai déclenché la Seconde Guerre mondiale suit Frank Dolas, soldat polonais en cette belle année 1939. Sans véritable envergure mais très ingénieux, il a la désagréable habitude de se faire faire prisonnier un peu partout où il passe, et de s’échapper par les moyens les plus farfelus. La guerre vient tout juste d’être déclarée, et sur les multiples fronts, il faut bien avouer que c’est le bordel. Ces fronts, Frank Dolas va les parcourir dans l’allégresse. Il voyagera ainsi de l’Autriche aux Balkans en passant par la Méditerranée et l’Afrique. Il affrontera les sous-marins italiens et les soldats SS. Il fêtera fort à la slivovica avec les partisans yougoslaves, se battra torse nu dans une taverne grecque, fera des affaires d’or dans les souks de la Légion étrangère… et tout cela sur un rythme endiablé et dans l’accumulation de situations si absurdes que les fous rires s’enchaînent.
Quelle originalité, quel culot ! Une comédie en temps de guerre, déjà il n’y en a pas beaucoup, sur la Seconde Guerre mondiale encore moins, datant de 1970 et réalisée à l’Est, alors là, on frise l’impertinence… un art que les Polonais maîtrisent admirablement bien. C’est aussi un véritable film d’aventure. Autre exemple dans le genre très peu académique du « film d’aventure de Seconde Guerre mondiale » ? Soldier of Orange de Paul Verhoeven. Sauf qu’ici, on rit franchement. La production est de grande qualité. Tous les rôles ont des gueules pas possibles et l’acteur principal Marian Kociniak (lui aussi décédé en 2016, quelle hécatombe !) est irrésistible. Alors suivez Frank Dolas alias « Grzegorz Brzęczyszczykiewicz » dans son odyssée pour des rires en cascade, et une manière particulièrement créative pour les Polonais de se réapproprier leur histoire douloureuse.